Selon l’activité et le contexte, différentes méthodes peuvent être utilisées pour valoriser une entreprise : comparables de marché, actualisation des flux futurs, approche « patrimoniale », etc.
Mais quelle que soit la méthode, la prise en compte de retraitements d’éléments financiers sera nécessaire afin d’établir une évaluation la plus proche possible de la réalité économique, en se basant sur des éléments qualifiés de “normatifs”.
En effet ces retraitements vont avoir pour objectifs :
En matière d’évaluation de PME, la valorisation par les multiples est la méthode la plus fréquemment utilisée. Dans l’optique de valoriser une entreprise (VE), il conviendra d’avoir une vision normative de l’Excédent Brut d’Exploitation (EBE) ou du Résultat d’Exploitation (REX) avant l’application d’un coefficient multiplicateur. Pour obtenir cette vision normative il est nécessaire de retraiter l’ensemble des postes n’ayant pas une valeur économique dite « classique » ou tout événement exceptionnel impactant positivement ou négativement le résultat. Les retraitements présentés ci-dessous sont ceux les plus fréquemment pratiqués dans le cadre de la valorisation d’une entreprise et ne sauraient être exhaustifs.
1. Loyers immobiliers
Lorsque le dirigeant d’une entreprise possède également le bâtiment d’exploitation via une entité différente (type SCI), celui-ci est libre de fixer le montant du loyer. Selon l’arbitrage souhaité il peut y avoir une survalorisation du loyer au profit de la SCI ou à l’inverse, une sous-valorisation du loyer permettant de dégager une plus forte rentabilité sur la société d’exploitation.
Il convient donc de bien analyser le prix de marché en fonction de la localisation et éventuellement faire estimer le bien par un expert immobilier indépendant capable d’indiquer une fourchette de prix de location. Si un écart jugé significatif apparaît, il convient alors de retraiter la différence entre le loyer comptabilisé avec le loyer dit de « marché ».
2. Salaire du dirigeant
La rémunération du dirigeant doit également être normalisée. Il est courant de retenir une rémunération chargée de l’ordre de 120 à 150 K€ pour une PME. Il est également important de savoir si des membres de la famille sont salariés, et en fonction du poste occupé de juger si le salaire semble adapté.
Dans le cas où un dirigeant actionnaire privilégierait la distribution de dividendes plutôt que le salaire, il y aura lieu de diminuer l’EBE de l’écart entre le salaire faible perçu et un salaire normatif.
3. Participation
La comptabilité française fait apparaître la participation versée aux salariés en pied de résultat après le résultat exceptionnel et avant l’impôt sur les bénéfices. Cette dépense est assimilée à des charges de personnel et doit donc être réintégrée à la masse salariale globale. Cette opération a donc pour effet de diminuer le niveau d’EBE.
4. Crédit-bail
La charge de crédit-bail peut être déduite à 100% des charges externes, et être considérées comme de la dette bancaire à moyen long terme (au passif du bilan). Le montant comptabilisé en charge est assimilé à un actif financier que l’on va amortir. De ce fait :
L’équivalent du capital restant dû auprès du crédit-bailleur sera ajouté à la dette financière nette.
5. Stocks
Au niveau bilanciel, le niveau des stocks a un impact direct sur la trésorerie de l’entreprise. D’un point de vue comptable, il est nécessaire de s’interroger sur la « juste valeur » des stocks et des méthodes de dépréciation utilisées.
Si après analyse on constate une valeur économique inférieure au montant inscrit à l’actif du bilan, une dépréciation sera nécessaire. Il conviendra alors de diminuer le Résultat d’Exploitation en comptabilisant cette dépréciation, et d’ajuster le niveau de trésorerie en conséquence.
6. Créances clients
A l’instar des stocks, les créances clients à l’actif du bilan doivent également être attentivement examinées. Des clients douteux sur lesquels une forte probabilité d’impayé existe sans qu’aucune dépréciation n’ait été constatée doivent conduire à un retraitement.
En effet, si l’entreprise dispose de suffisamment d’éléments permettant de juger ce risque de défaut de paiement (exemple : client en liquidation judiciaire et 10% de la créance ne sera pas récupéré) alors il convient de comptabiliser une dépréciation qui viendra diminuer le Résultat d’Exploitation (REX).
7. IFC
Les indemnités de fin de carrière (IFC) sont dues aux salariés lors de leur départ à la retraite et sont fonction de leur ancienneté dans la structure.
Si elles ne sont ni provisionnées, ni externalisées, l’acquéreur devra les décaisser sur la trésorerie de la société lorsqu’elles seront dues. En matière de retraitement, les IFC à décaisser dans les 5 à 7 ans post cession qui ne sont ni provisionnées ni externalisées peuvent être réintégrées aux dettes au même titre que la participation et l’intéressement dès lors qu’elles sont gérées en compte courant de l’entreprise sans externalisation auprès d’un organisme tiers.
8. Évènements exceptionnels liés au COVID-19
Le COVID-19 a engendré pour de nombreuses entreprises des éléments considérés comme exceptionnels, non récurrents et ponctuels. Dès-lors, il est possible de neutraliser ces charges ou produits non comptabilisés. Ces retraitements doivent être acceptables, raisonnables et bien documentés pour défendre la position adoptée. Quelques exemples plus ou moins prépondérants en fonction du secteur d’activité : revenus perdus ou différés (décalage de livraison post-clôture), des dépenses de technologie de l’information et matériels pour permettre le travail à distance, dépenses liées à la résiliation de baux ou d’autres contrats d’exploitation, augmentation de la rémunération ou des incitations offertes aux employés, les frais d’absence ou de départ des employés et les frais de réembauche.
D’autres postes peuvent également faire l’objet de retraitement (le recours systématique à de l’amortissement dérogatoire, la facturation par une structure Holding de Management Fees très au-delà des charges réelles sous-jacentes qu’elles sont censées couvrir, etc.). Il convient donc d’étudier en détail les aspects comptables et opérationnels de la société pour en estimer une valorisation argumentée.